mercredi 7 février 2018

La génération bâtarde ...

Un constat amer d'un jeune tunisien sur sa génération mal dans sa peau; parceque trop diplômée mais mal formée. Une génération du cul entre deux chaises : tiraillée entre tradition et modernité, proie facile pour populistes de tous poils !
R.B
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Yassine Ayari représente parfaitement ma génération. Et j’en suis tellement désolé.
C’est cette génération apprenante, mais tellement inculte. De niveau universitaire au rabais.
C’est la génération Ben Ali, celle de la réussite facile et du déficit des capitaux sociaux, culturels et politiques. C’est la génération qui trouve refuge dans la radicalisation et le repli identitaire, tout en étant la génération qui a le plus accès au monde extérieur, tout en étant en crise constante d'identité. C’est la génération de la Tunisie fermée mais qui a accès à internet, à un Occident fantasmé et en même temps haï ... 
C’est la génération du cul entre deux chaises !
C’est la génération du périurbain tellement en mal de considération, à la marge de la citoyenneté, qui n’a jamais pu accueillir « une personnalité à l’aéroport », qui n’a jamais dépassé le hall d’accueil de l’aéroport. C'est la génération « visa », la génération en mal de repères et contre tous les repères.
C’est le petit soldat sous-officier qui n’ira jamais au mess des officiers, qui va mourir pour la nation (très bien, mais après ?) mais dont les enfants ne seront jamais dans les jolis cercles et qui peuvent basculer du jour au lendemain entre les bars à putes et les camps d’entraînement de l’EI, d'Ansar Al Chariaa et autre merde du même acabit !
L'attitude de Yessine Ayari, me rappelle le film « La Haine » de Mathieu Kassovitz. 
C’est la révolte des ploucs. C’est la révolte de « la Tunisie d’en-bas », qui est « parvenue » mais qui est toujours perçue comme celle d'en bas.

C’est l’ingénieur en informatique parti étudier en Allemagne, qui a ouvert sur son browser internet un site porno juste à côté d’un site sur l’Imam Ali. C’est celui qui est capable de te parler des dernières avancées sur l’Intelligence artificielle tout en croyant dur comme fer à l’avènement de l’antéchrist. Qui adore Hassan Nasrallah et le Hezbollah tout en soulignant que le grand malheur de l’Islam c’est le chiisme ! 
C’est la génération de la théorie du complot, mais qui croit dur comme fer en la « révolution ». Mais attention pas « la révolution du 14 janvier 2011 », ni celle des article 56 et 57 de la constitution, mais plutôt la révolution du Commandant Tarhoumi, la révolution de « l’image » montrant Imed Trabelsi menottes aux mains au tribunal. La révolution des trolls qui ont bousillé l’image de Chebbi et « sa femme Jeribi », qui ont pointé du doigt Ben Jaâfar « l’ami des homosexuels » et « l’ami des laïcs ». La révolution de ces jeunes qui ont fustigé les « kouffars » (mécréants) de l’extrême gauche. La révolution de ces jeunes qui vomissent le RCD mais qui ont passé toute leur enfance dans les « chou'ab » (cellules du parti RCD) à jouer au ping-pong. Ces jeunes qui aiment Ennahdha, pour porter haut « les couleurs de l’islam » mais qui trouvent les nahdhaouis trop dans le « business as usual » (dans les affaires, comme d'habitude), pas assez « révolutionnaires ». Ces jeunes qui adorent que le président leur parle de l’islam entre deux verres de vin et du pois-chiche ramené au palais ! Ceux qui adorent la délation sous prétexte de fustiger la corruption mais qui sont dans la vindicte, dans la haine de l’autre, dans le cri. Ces hommes qui s’estiment en droit d’avoir des relations sexuelles et de pouvoir s'en vanter, mais qui ne conçoivent pas de se marier avec une fille non vierge ! 
C’est la génération qui vomit l’Occident ... depuis Paris ! Celle qui insulte les femmes démocrates sans avoir jamais lu un article sur leurs travaux, qui trouve que la fille violée « l’avait bien cherché avec sa mini jupe »; mais qui ne ratera jamais une occasion pour scanner le derrière d'une femme qui passe, qu'il traitera de pute si elle le remet à sa place.
Ces faux progressistes, ces faux panarabistes, ces faux panislamistes, ces faux démocrates : je ne les connais que trop bien.
Une génération malheureusement « bâtarde », et Dieu sait à quel point je déteste ce mot. La génération de trop, qui n’est ni dans le passé (militant ou réactionnaire) et certainement pas dans un futur révolutionnaire, au vrai sens du mot.
Cette génération, ma génération, je l’assume malheureusement, mais ne me demandez surtout pas de la soutenir sous prétexte qu’elle serait meilleure que les générations qui l'ont précédée.

* Consultant auprès d’une institution internationale pour le développement

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