mardi 12 avril 2016

ANNIVERSAIRE DU DÉCÈS DE BOURGUIBA, UN DE PLUS RATÉ !

Article paru dans : Kapitalis


" La récompense des grands hommes, c'est que, longtemps après leur mort, 
on n'est pas bien sûr qu'ils soient morts."
Jules Renard

 " Les Frères musulmans militent pour couper les mains et trancher les têtes ; 
nous, nous militons pour que le tunisien garde la tête haute et les mains sans chaînes "
Bourguiba
 L’image contient peut-être : une personne ou plus et gros plan
Le 6 avril 2000 décédait le fondateur de la Tunisie moderne. Les tunisiens se souviennent avec amertume comment Zine Eddine Ben Ali les avait empêchés de saluer comme ils l'auraient souhaité, le départ de ce grand homme qui lui faisait de l'ombre. 

Mais voilà, depuis la révolution du 14 janvier 2011, les hommes politiques de tout bord constatent que la mémoire de Bourguiba est restée intacte chez des millions de tunisiens. Certains qui ont cru pouvoir l'effacer, comme Ghannouchi et Moncef Marzouki, ont tout fait pour la salir; allant jusqu'à vouloir changer l'hymne national et le drapeau national pour réécrire l'histoire de la Tunisie et contester à Bourguiba son nationalisme contraire à leur idéologie de pan islamiste pour le premier et de pan arabiste pour le second.
Il est clair que malgré ces tentatives, Bourguiba est sorti renforcé de la période récente; et l'on peut dire, car c'est évident, que si la Tunisie a su résister si bien aux tentatives d'islamisation des partis islamistes, c'est en raison de ce que Bourguiba avait apporté en matière de gouvernance et de progrès. 

La pratique de l'histoire officielle est courante même dans les pays démocratiques; puisqu'en France, pour ne citer que cet exemple, l'histoire de la résistance et de la collaboration sous le Maréchal Pétain, comme celle de la guerre d'Algérie, n'ont pas fini de diviser les historiens et que les politiques ont écrit une histoire qui n'est pas toujours conforme à la réalité.

Ce que Bourguiba fera, lui aussi, quand il ne retient de l'histoire de la Tunisie des Beys que celle du Bey qui a signé le traité du Bardo par lequel la Tunisie perdra sa souveraineté pour devenir une colonie de la France, oubliant volontairement trois siècles de régime beylical qui s'est construit contre la Sublime Porte jusqu'à l'autonomie vis à vis de l'empire Ottoman, avec des réalisations que beaucoup de tunisiens ignorent encore, telles que l'établissement de la première constitution ou l'abolition de l'esclavage, deux premières dans le monde dit "arabo-musulman" ! 

Mais cette histoire des Bey si elle doit être de nouveau connue, ne doit pas servir à régler des comptes; et il est absolument navrant que la célébration de l'anniversaire de la mort de Bourguiba soit confiée à Samir el Wafi qui fait voir l'histoire de la Tunisie aux tunisiens par le petit bout de "sa" lorgnette

Heureusement que les invités de son émissionLiman yajroo fakat " ( " Pour ceux qui osent uniquement ! ") sur la chaîne TV, El Hiwar Ettounsicopie conforme de " Tout le monde en parle " de Pierre Ardisson, racoleuse à souhait, sont restés dignes ... et que Hajer Bourguiba n'a pas cédé au populisme de l'animateur, véritable bateleur de foire !

Hajer Bourguiba sans esquiver les griefs contre son père adoptif, a rappelé aux tunisiens que Bourguiba n'avait pas fait un coup d'Etat comme le prétendent les partisans du Bey; puisque concomitamment à l'indépendance, il a fait une révolution pour en finir avec les monarchies en instaurant la République !

Pour le reste, rappelle-t-elle à propos des griefs que rappelaient les descendants du Bey, tout changement de régime s'accompagne d'exactions à l'encontre de ceux qui détenaient le pouvoir, prenant l'exemple des bijoux de la famille beylicale récupérés par les familles régnantes qui lui ont succédé : d'abord par Wassila Bourguiba, puis par Leila Ben Ali ... mais qui restent tout compte fait, en grande partie propriétés de l'Etat; puisqu'ils figurent encore dans l'inventaire des biens nationaux, même après le 14 janvier 2011 !

Quand aux exactions à l'encontre du Bey et de sa famille, Hajer Bourguiba rappelle encore une fois que c'est le propre de toutes les révolutions; insinuant qu'il y a pire en faisant allusion à la révolution française qui a décapité le monarque et la reine.

C'est à l'honneur du Bey Lamine d'avoir décliné l'offre de De Gaulle d'être l'hôte de la France, rappelant à celui-ci qu'un Bey ne quitte jamais son pays et aspire à mourir chez lui.
Autrement dans quel pays ayant subi un tel changement de régime, l'ancienne famille régnante a pu continuer à vivre ? Demandez le aux familles royales de Grèce et d'Italie, entre autres !

Mohamed Ali Bey, arrière-petit-fils de Ezzedine Bey, un des invités de l'émission, semblait bien remonté contre Hajer Bourguiba dont il rappelle l'adoption par Bourguiba pour bien préciser qu'elle n'est pas sa fille naturelle.  Elle n'avait aucun complexe de parler de tout çà lui dit-elle, en lui rappelant les propos de Bourguiba sur sa propre fertilité !

A la question de l'animateur pour savoir quel homme parmi tous ceux qui se revendiquent de Bourguiba, représente le bourguibisme de nos jours, Hajer Bourguiba reconnait avoir voté comme beaucoup de tunisiens contre les Frères musulmans en plébiscitant Béji Caïd Essebsi, mais reste réservée à propos de Nidaa Tounes qui semble l'avoir déçue comme il a déçu une bonne majorité de ceux qui l'ont porté au pouvoir ! Devant l'insistance de l'animateur, Hajer Bourguiba finit par avouer qu'aucun de ces hommes ne représente le bourguibisme, rappelant que Bourguiba était plutôt de gauche.

Quand aux Frères musulmans que Bourguiba avait combattus sa vie durant, l'animateur s'étonne avec ironie de leur retournement de veste quand après sa diabolisation systématique, ils tentent de le récupérer; puisqu'ils vont jusqu'à l’encenser depuis qu'ils gouvernent avec ceux qui se prétendent bourguibistes.  

Un sociologue présent sur le plateau, regrettait que l'histoire de la Tunisie soit réduite à des propos de concierge; et que les chaînes de TV ne lui consacrent pas des émissions d'un autre niveau avec des participants d'une autre envergure, souhaitant un débat plus profond dans une émission plus sérieuse, laisse-t-il entendre !!

Ne serait-il pas temps pour les tunisiens de revoir leur histoire sereinement telle qu'elle est et non telle que les pouvoir en place veulent la leur inculquer, vue à travers le prisme de l'idéologie qui les anime ? Cette histoire doit être le fait des historiens et non des partisans des uns ou des autres qui n'ont aucun souci d'objectivité ni de mesure;et qui semblent vouloir relancer, bien inutilement, les vieilles querelles.

Rachid Barnat


4 commentaires:

  1. La lettre de Bourguiba, étudiant à Sciences Po Paris, à Mustapha Kaak

    http://www.leaders.com.tn/article/19531-document-inedit-la-lettre-de-bourguiba-etudiant-a-sciences-po-paris-a-mustapha-kaak

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  2. HOMMAGE DE Hager * BOURGUIBA A SON PÈRE Habib BOURGUIBA - 6.4.2020

    Cette année, je ne pourrai pas me recueillir sur ta tombe. Pas de cérémonie officielle, ni l'hommage populaire et spontané comme les Tunisiens savent te le rendre et que tu aimes par-dessus tout. Mais rassure-toi, personne ne t'a oublié, tu es toujours vivant dans nos cœurs et notre mémoire. Chacun de nous, sans se déplacer, sera dans le recueillement ce lundi 6 Avril, 20 ans jour pour jour après ta disparition.
    Jeudi 6 Avril à 9h du matin, je tenais encore ta main quand tu es parti, je verse encore des larmes tant cet instant est resté gravé dans ma mémoire, car penser que je t'ai perdu signifiait pour moi être seule pour toujours. "Baba" comme je t'appelais un beau mot, que tu portais si bien il avait cessé de résonner, le mot Baba avait cessé d'exister. Ma bouche était devenue muette sans ce mot que je ne pourrai plus prononcer. Mon cœur saigne pour évacuer ses maux.
    Très vite je réalisai que je n'étais pas seule, la Tunisie entière s'était sentie orpheline. Je me sentais alors plus forte, et je devais être plus digne pour te faire honneur, toi le père de tous les Tunisiens.
    Parfois je me dis que tu ne m'as pas assez préparée pour affronter la laideur, les mensonges, la haine et les maléfices, j'ai mal d'entendre certains haineux et méchants même s'ils sont rares, tenter de souiller ta mémoire, je voudrais leur dire qu'ils se trompent, et que tu es formidable. Le vent de l'histoire s'en chargera et les balaiera.

    Baba, je n'ai jamais pu te dire que je t'admirais, tu as été un père extraordinaire, tu avais toujours le temps pour moi, pour mes devoirs ou pour me faire rire malgré tes occupations.
    Tu me réclamais souvent pour t'accompagner, je ne me rendais même pas compte que tu n'étais pas un père comme les autres. Je saluais avec toi la foule venue t'acclamer sans me douter de cette singularité.
    Je suis fière aujourd'hui d'être ta fille.
    Allah yerhamek ya Baba El Aaziz.

    Tu as combattu l'ignorance et l'obscurantisme, l'injustice et les inégalités, et aujourd’hui je suis fière de mon pays et de tous ses enfants.
    Cette année, c'est toi qui rendras hommage à tous nos soldats du 1er rang, celui du corps médical, les agents de la propreté, l'armée, la sûreté et tous les volontaires qui aident ceux qui en ont le plus besoin. Ils sont tous merveilleux et nous vaincrons toutes ces menaces, nous nous en sortirons.
    Je te rassure, nous ne laisserons pas le virus se propager et nous veillerons à ce que ce confinement ne se transforme pas pour certains en famine, en violences conjugales ou encore en décrochage scolaire et que les injustices ne se creusent pas davantage car il y a confinement et confinement.

    Nous resterons solidaires. #yedfelyed (sans se toucher les mains)

    Je te rassure la Tunisie restera debout.

    #cheddarek #restonscheznous

    * Fille adoptive du couple Bourguiba et qui est la nièce de Wassila Ben Ammar

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    1. C'est touchant de pleurer son père, fût-il adoptif.

      Mais il eut mieux valu honorer sa mémoire en défendant ses principes et son combat pour la Tunisie et ne pas le trahir, en affirmant que s'il était vivant il se serait réconcilié avec les Frères musulmans, qu'il avait combattus toute sa vie et à juste titre car leur projet est à l'opposé de celui de Bourguiba !

      Ils nient la nation et nient la république car ils aspirent à la restauration du califat.

      Pour cela ils détruiront tout ce que ce père de la Tunisie moderne avait patiemment construit avec les destouriens libérateurs de la Tunisie et bâtisseurs de la République.

      Dommage qu'elle ait fait cette déclaration qui légitimait un peu plus Ghannouchi et son parti.

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  3. LES FILLES DE BOURGUIBA, A SON ENTERREMENT ...

    Sihem Bouzgarou :

    Le 8 avril 2000, j’ai incité toutes mes cousines à participer aux funérailles du Président Bourguiba, en leur disant qu'il n'était pas possible que nous ses descendantes, nous n'assistions pas à ses obsèques, alors qu'il nous a libérées !

    Nous nous sommes regroupées et nous nous sommes dirigées vers le mausolée, en partant de la maison familiale en face de la mer, à Karaiâ !

    Nous avons été arrêtées par le service d'ordre et une cousine de papa, tata Mélika Bourguiba Saheb Ettabaâ a dit au chef : "Je suis la nièce du Président Habib Bourguiba ! Et je vais assister aux obsèques de mon oncle ! À la mort de ammeti Néjia, Ammi a exigé que nous assistions à ses obsèques et nous y avions assisté ! À la mort de tata Mathilde, sa première épouse et mère de son enfant unique, il a exigé que nous assistions à ses obsèques et nous y avons assisté ! Aujourd'hui, ammi est décédé et nous devons assister à ses obsèques ! "

    Là, le chef gradé impressionné par cette femme de caractère -qui ressemble à Bourguiba comme deux gouttes d'eau - a pris des dispositions et nous a attribué un endroit aux pieds des escaliers du mausolée !

    Au passage du cortège funèbre, des policiers en civile nous ont encadrées et nous avons entonné le chant de la Révolution houmet al hima, les larmes aux yeux !

    C'était très émouvant !
    Un moment très fort !

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